Mesure pour Mesure

de William Shakespeare | traduction de Jean-Michel Déprats
mise en scène de Vincent Poirier
création 2024

tout public
durée : 2h30 

synopsis
Cette pièce décrit la souffrance d’un personnage promis à la mort pour un délit dérisoire : Claudio doit payer de sa vie un faux pas d’amoureux insouciant. 
L’intrigue se présente comme le parcours semé d’embûches d’un souverain fautif, le duc Vincentio, soucieux de réformer et de restaurer son autorité dans la cité de Vienne. Il reconnaît qu’il n’a jamais veillé à l’application d’une loi punissant de mort l’adultère ou la fornication et que son laxisme durant quatorze ans a entraîné une licence de mœurs qu’il serait malvenu de vouloir corriger après l’avoir laissée s’installer. Prétextant une mission secrète en Pologne, le Duc confie la tâche de rétablir l’ordre moral à son cousin Angelo, juge intègre et très rigoureux. La nouvelle sidère le monde débauché des bordels de Vienne : la plupart des maisons de plaisirs seront rasées. Condamné à mort, le jeune seigneur Claudio est la première victime de cette soudaine nomination…

note d’intention | Vincent Poirier, metteur en scène

origines 
Après avoir déjà traversé deux aventures shakespeariennes dans mon parcours de metteur en scène (Titus Andronicus en 2003, Roméo et Juliette en 2009), j’ai eu le désir de me rapprocher, à nouveau, d’un texte du dramaturge anglais. Cette fois-ci, je me suis emparé d’une comédie de pouvoir, Mesure pour Mesure, où « tout est bien qui finit bien ». Cependant, cette pièce est traversée par bon nombre d’angoisses toujours si prégnantes aujourd’hui : le fanatisme religieux, la corruption des personnalités politiques, l’absence de liberté, l’opacité de la justice, le retour de la peine de mort, l’écrasement des « sans-grades », la fragilité de nos démocraties.
Écrite en 1604, Mesure pour Mesure est une pièce polymorphe qualifiée de problem play – pièce problématique – pour n’être ni une comédie, ni un drame, ni une tragédie. Et pourtant, elle se sert de ces trois genres pour tisser son scénario. Je me suis laissé séduire par son format imparfait, ténébreux et baroque.
Mesure pour Mesure porte trois sujets majeurs : la nature de la justice, la nature de l’autorité, la nature du pardon.
Ici, la pulsion sexuelle et l’abus de pouvoir sont au coeur de l’action.
Pour nettoyer sa ville sans se déjuger, le Duc va donc nommer un régent : son cousin, le juge Angelo. Investi des pleins pouvoirs, ce Tartuffe abuse de sa puissance en orchestrant une politique répressive écrasant le peuple. La prison et les palais de justice grignotent inéluctablement l’espace public, et les lieux de plaisirs sont détruits. L’angoisse et la peur de la condamnation à mort sont constantes. Les personnages avancent masqués pour marquer leur domination ou dissimuler leurs faiblesses. La jeunesse est bafouée, le sexe interdit hors des « sentiers battus », le petit peuple écrasé. La classe dirigeante tient, d’une main de fer, les leviers du pouvoir.

inspirations 
Tous les régimes autoritaires, les républiques en souffrance, les religions déviantes et intégristes sont à mettre en parallèle avec les actes purificateurs d’Angelo, le juge tourmenté de Mesure pour Mesure.
En France, le régime de Vichy ordonna la fermeture des lieux emblématiques de la nuit parisienne et tenta d’instaurer un système interdisant toute forme de plaisir, au profit d’une ligne idéologique stricte prônant l’amour de la patrie et de son église. Shakespeare dresse ce même système répressif dans cette pièce. Angelo, régent et ange purificateur au pouvoir absolu, mène une politique punitive dans une Vienne corrompue où tout acte de chair est banni par décret.
Cette situation d’oppression rappelle inéluctablement des épisodes récents. Je pense notamment au retour de la théocratie talibane en Afganistan en 2022 qui a imposé son ordre rigoriste en excluant les femmes et les filles de l’espace public. Mais je pense aussi à la République islamique d’Iran qui enferme tour à tour des intellectuels, des activistes et des artistes. La tension est montée d’un cran à l’occasion de la mort récente d’une Iranienne d’origine kurde, Mahsa (Jina) Amini, qui a provoqué un soulèvement encore jamais vu dans ce pays.
Trois cinéastes iraniens ont été emprisonnés en juillet 2022. Mohammad Rassoulof et son confrère Mostafa Al-Ahmad ont ainsi été interpelés chez eux et conduits en détention au motif de leur activisme « antirévolutionnaire ». Quelques jours plus tard, ce fut au tour de Jafar Panahi, venu devant la prison où étaient incarcérés ses collègues, d’être appréhendé. Je me permets ce pas de côté car ces évènements déchirants ainsi que les longs-métrages de ces cinéastes me sont parvenus comme de vrais creusets d’inspiration. La pièce, Mesure pour Mesure, est quand à elle, un outil dramaturgique remarquable, à la mesure de leurs paroles. Je me souviens parfaitement de ma découverte fracassante du cinéma de Rassoulof. Un homme intègre, sorti en 2018, se présente comme un réquisitoire implacable contre la corruption en Iran. La saison passée, je découvrais son film le plus récent : Le diable n’existe pas, lauréat de l’Ours d’or à Berlin, qui a certainement précipité son arrestation. Les nuits de Mashaad du cinéaste iranien Ali Abbasi fait aussi écho à l’ambiance poisseuse de la pièce de Shakespeare. Le personnage principal prétend laver Mashaad de ses pécheresses qui salissent la ville sainte. La nuit, il part en « croisade », assassiner les prostituées des faubourgs. Il se persuade d’être le justicier de la ville. Saeed Roustayi, autre figure importante du cinéma iranien, dénonce avec véhémence la corruption du système judiciaire dans La loi de Téhéran. Je garderai longtemps en mémoire cette séquence redoutable d’une condamnation à mort collective : les détenus sont tellement terrorisés qu’ils pissent dessus avant l’ultime souffle. Le cinéma social iranien fait preuve d’un courage intellectuel admirable face à la situation politique et économique de son pays. J’aimerais rendre hommage humblement à ce cinéma courageux, sensible et si intelligent.

dossier de production disponible sur demande

distribution
mise en scène . Vincent Poirier
texte . William Shakespeare
traduction . Jean-Michel Déprats 

avec Benjamin Bécasse Pannier, Rodolphe Dekowski, Vincent Poirier, Taya Skorokhodova, Romina Villar
et Fabrice Bisson, Manu Constant, Anne Dussutour, Philippe Jouan de la compagnie Joe Sature et ses Joyeux Osselets
son . Amélie Polachowska
lumière . Martin Teruel
scénographie . Charles Altorffer
construction décor . Mathieu Delangle
régie . Grégory Salles
production et diffusion . Lisa Coulon (06 87 71 17 74)
partenaires . théâtre municipal de Coutances (50), Archipel – Granville (50), Le Forum – théâtre de Falaise (14), La Renaissance – Mondeville (14) [recherche en cours]

calendrier de tournée de création
06 février 2025 . Le Forum – Théâtre de Falaise (14)
04 février 2025 . Archipel, Granville (50)
30 janvier 2025 . Théâtre de la ville de Saint-Lô (50)
28 janvier 2025 . Halle Ô Grains, Bayeux (14)
03 décembre 2024 . La Renaissance, Mondeville (14)
21 novembre 2024 . Espace Culturel François Mitterrand, Canteleu (76)
13 et 14 novembre 2024 . Théâtre Municipal de Coutances (50)

calendrier de production
octobre 2024 . résidence au Théâtre Municipal de Coutances (50)
septembre 2024 . résidence au Forum de Falaise (14)
septembre 2024 . résidence à La Renaissance, Mondeville (14)
avril 2024 . résidence à l’Archipel, Granville (50)
automne 2023 . résidence Souslespylônes, Saint-Pierre-de-Coutances (50)
avril 2023 . résidence Souslespylônes, Saint-Pierre-de-Coutances (50)
septembre 2022 . résidence Souslespylônes, Saint-Pierre-de-Coutances (50)